Césaire Levillain, héros humaniste de la résistance Rouennaise
Né le 23 février 1885 à Fresnoy-Folny de parents cultivateurs, il est instituteur adjoint quand il s'engage, le 2 octobre 1905, pour 3 ans, dans le 39è Régiment d'Infanterie de Rouen. Mais le 1er juin 1906, il est réformé pour tuberculose pulmonaire.
Il devient instituteur, puis professeur à l'Ecole Supérieure de Commerce de Rouen.
Entre-temps, il épouse Céline Virginie THERIN, de 2 ans sa cadette, à Fresnoy-Folny le 24 août 1908.
En septembre 1914, il est maintenu réformé pour tuberculose pulmonaire.
En 1930, il devient Directeur de l'Ecole Supérieure de Commerce de Rouen. Il marque ses élèves par son charisme, son humanisme et son engagement social à l'égard de tous ceux qui peuvent avoir besoin d'aide ou de conseils. Ainsi, il trouve des emplois pour ses anciens élèves dont Raoul Leprettre.
A partir de 1932, arrivent des réfugiés, des juifs et ceux qui fuient l'Allemagne d'Hitler, l'Italie de Mussolini ou l'Espagne de Franco. Ils ne parlent pas Français, ou peu. Césaire organise pour eux des cours particuliers et des conférences. Certains sont nourris au réfectoire et logés dans les dortoirs de l'Ecole Supérieure de Commerce.
En 1940, il s'insurge de la capitulation de Pétain. Dès 1941, il fonde le réseau Cohors-Asturies à Rouen, il appartient également au mouvement Libération-Nord. Il recrute son ami Henri Savale et son épouse Suzanne. De son côté, Henri recrute Michel Corroy, secrétaire au commissariat de police de Darnétal, qui devient le second de Césaire Levillain.
Très vite, le réseau s'étoffe de nouveaux membres, tels Raoul Leprettre (directeur de l'imprimerie WOLF) et son épouse ; Mme Corroy ; Henri Choquet et son épouse ; Tony Larue ancien maire de Grand Quevilly, évincé de la mairie par Vichy ; Charles et Marie Thévenet cultivateurs au hameau du Fossé, à St Denis le Thiboult, qui se spécialisent dans la réception d'armes mais aussi d'agents de renseignements parachutés par la France Libre.
Le réseau recueille les aviateurs anglais dont les avions ont été abattus autour de Rouen. Il faut les loger, puis leur faire gagner l'Espagne via Houilles. Il relève également les numéros des unités allemandes, ce qui permet de suivre les mouvements de troupes. Les renseignements sont transmis, par l'intermédiaire d'Agnès Goetchel, à Jean Cavailles, professeur à la Sorbonne et créateur du service de renseignements Cohors-Asturies.
En 1942, Césaire est contraint de quitter son poste de direction de l'Ecole de Commerce, il donne des cours d'anglais à son domicile pour subvenir aux besoins de sa famille.
La principale tâche de Suzanne Savale consiste à fabriquer de fausses cartes identité pour les réfractaires au Service de Travail Obligatoire (STO) en Allemagne. Raoul Leprettre fabrique les fausses attestations de travail dans son imprimerie. Charles et Marie Thévenet hébergent une centaine de réfractaires avant de les faire passer dans l'Eure où des planques leur sont trouvées. Le réseau aide d'autres réfractaires à gagner les Forces Françaises Libres en Afrique du Nord.
Le 24 mai 1943, muni de faux papiers établis par Suzanne, un jeune réfractaire au STO est arrêté à Dax lors d'un contrôle dans le train. Torturé, il lâche les noms de Suzanne Savale et Césaire Levillain. La Gestapo de Biarritz vient les arrêter le 29 mai 1943.
Quelques semaines plus tard, Michel Corroy tombe à son tour dans une souricière à Paris. Suzanne Savale est emmenée à des fins d'interrogatoires, à Biarritz où elle est sauvagement battue. Elle est ensuite internée au Fort du Hâ, à Bordeaux, puis emmenée à la prison de Fresnes. Là, elle retrouve Césaire Levillain, incarcéré dans la cellule située au-dessous de la sienne. Ils parviennent à correspondre. Le 23 octobre 1943, elle seule est ramenée à Rouen, dans les sous-sols du Palais de Justice. Elle est condamnée à mort. A son tour, Césaire Levillain est transféré à Rouen. Le 4 mars 1944, Césaire Levillain et Michel Corroy sont fusillés, puis brûlés par l'Armée allemande dans la forêt au dessus du stand de tir du Madrillet au Grand-Quevilly. Suzanne Savale voit sa peine commuée en déportation quelques heures avant l'exécution prévue. Elle est rapatriée à Darnétal le 29 avril 1945.
Raoul Leprettre reprend la direction du mouvement Libé-nord jusqu'à son arrestation puis sa déportation à Dachau le 2 juillet 1944.
Officier de l'Instruction Publique, Césaire LEVILLAIN a reçu à titre posthume la Médaille Militaire et la Croix de Guerre.
Une statue de Césaire LEVILLAIN est inaugurée par Tony Larue en 1954, sur l'avenue Franklin Roosevelt à Grand-Quevilly. Plusieurs rues et places portent son nom dans la banlieue rouennaise.
Sources : témoignage Raoul Leprettre, enregistré par les Archives Départementales 76
témoignage Ginette Spannagel, fille de Charles et Marie Thévenet
témoignage Michel Sodtmann, ancien élève de Césaire Levillain
Suzanne Savale, résistante normande... de Catherine Laboubée, Ed. de la Rue