Germaine Tillion, résistante pétrie d'humanité

01/03/2013 15:11

Elle naît le 30 mai 1907 à Allègre, en Haute Loire. Son père Lucien Tillion est magistrat et sa mère l'écrivain Émilie Cussac.

Passionnée par les êtres humains, Germaine suit une formation d'ethnologue auprès de Marcel Mauss et Louis Massignon. Licenciée en lettres, elle est diplômée de l'École pratique des hautes études, de l'École du Louvre, et de l'INALCO. 
Entre 1934 et 1940, elle réalise quatre séjours en Algérie pour étudier l'ethnie berbère des Chaouis dans le cadre de sa thèse. Elle rentre en France au moment de l’armistice de 1940. Dés 1940, elle intègre le réseau de résistance Gloria (homologué après la guerre sous le nom du Musée de l'Homme) et devient l'adjointe de Paul HAUET. Le réseau travaille à l’évasion des prisonniers et au renseignement auprès des Anglais.

Après les arrestations et les exécutions de Boris Vildé, Anatole Lewitsky et de Paul Hauet, elle dirige le réseau de Résistance du Musée de l'homme, avec le grade de commandant, de 1941 à 1942
Dénoncée par l'abbé Robert Alesch (qui, jusqu'à la Libération,  transmets aux Allemands les renseignements recueillis en confession), Germaine Tillion est arrêtée le 13 août 1942, et déportée vers Ravensbrück le 21 octobre 1943.

Sa mère, résistante également, est arrêtée puis déportée à son tour de Compiègne vers Ravensbrück le 31 janvier 1944. Germaine prend soin de sa mère autant qu'elle le peut.

Son expérience d'ethnologue sert à Germaine pour déchiffrer très vite toutes les structures du camp nazi : le travail, la mort et l'argent. A qui ce système profite-t-il ? La compréhension du monde dans lequel elle vit la rend plus forte et l'aide à dominer la vie féroce du camp. Afin de partager cette force avec les autres prisonnières, elle organise un dimanche après midi, à l'insu des nazis, une conférence pour ses compatriotes.

Parallèlement, elle écrit sur un cahier soigneusement caché, une opérette "Le Verfügbar aux Enfers" où elle mêle à des textes relatant avec humour les dures conditions de détention, des airs populaires tirés du répertoire lyrique ou populaire. 

Début mars 1945, grâce à une hospitalisation et des complicités, elle échappe à un convoi vers le camp de Mauthausen. C'est à ce moment que sa mère disparaît. Germaine enquête sans relâche auprès de ses compagnes pour retrouver trace d'Emilie Tillion. Elle finit par découvrir que sa mère a été gazée le 2 mars 1945.

Germaine Tillion est libérée par la Croix-Rouge le 23 avril 1945, et soignée en Suède, avec 300 autres de ses camarades.

Après la guerre d'Algérie, elle s'engage dans divers combats politiques contre la clochardisation du peuple algérien, contre la torture en Algérie et pour l'émancipation des femmes de Méditerranée, qui doivent par obligation économique avoir beaucoup d'enfants mais aussi privilégier les fils sur les filles.

Son séminaire d’ethnologie du Maghreb à l'École pratique des hautes études est resté une référence.

En 1999, elle est élevée à la dignité de Grand-Croix de la Légion d'Honneur, rejoignant ainsi cinq autres femmes, à savoir Geneviève de Gaulle, Valérie André, Jacqueline de Romilly, Simone Rozès et Christiane Desroches Noblecourt. C'est Geneviève de Gaulle-Anthonioz qui vient lui remettre sa décoration dans sa maison, le 23 décembre 1999.

En 2004, elle lance avec d'autres intellectuels français un appel contre la torture en Irak.

Son opérette "Le Verfügbar aux Enfers" est mise en scène pour la première fois en 2007, au théâtre du Châtelet, à Paris.

Germaine meurt le samedi 19 avril 2008 à son domicile de Saint-Mandé (Val-de-Marne) dans sa 101e année.

Germaine Tillion considérait que chacun devait rester vigilant face au mal : « Au terme de mon parcours, je me rends compte combien l'homme est fragile et malléable. Rien n'est jamais acquis. Notre devoir de vigilance doit être absolu. Le mal peut revenir à tout moment, il couve partout et nous devons agir au moment où il est encore temps d'empêcher le pire. »

 

Source     Germaine Tillion